Marie-Lou Reymondon
Doctorante
Thèse:
- Intitulé : Les avantages et les inconvénients épistémiques de la diversité en science
- Directeur : Cédric Paternotte
- Inscriptions: 2021
Résumé de thèse
Au sein des laboratoires scientifiques où se mettent en place des projets de recherche participative, dans les universités où la sélection se veut plus inclusive, dans la recherche médicale où s’investissent des associations de patients ou dans les assemblées citoyennes qui délibèrent sur la gestion des risques, la promotion de la diversité en science est un enjeu de plus en plus pressant. Des termes comme « science citoyenne » (citizen science), « expertise profane », « démocratisation de la science » sont alors apparus ces dernières années. Cette promotion de la diversité en science n’a pas pour unique but de permettre plus de justice sociale, mais elle prétend également améliorer l’ampleur et l’objectivité de la connaissance scientifique. Sommes-nous justifiés à utiliser un tel argumentaire épistémique pour promouvoir la diversité ou bien les désavantages produits par cette diversité annulent-ils ses bénéfices ?
Notre travail consiste à conceptualiser la diversité dans une perspective épistémique. En partant de la critique d’une science prétendant adopter une « vue de nulle part » objective et neutre, l’épistémologie du positionnement a pu trouver dans la diversification des perspectives une réponse à l’amélioration de l’objectivité en science. Pour diversifier ses perspectives, la communauté scientifique doit-elle également diversifier cognitivement et socialement les agents qui la composent?
La diversification de la science peut également renvoyer à la participation des profanes. A quelles conditions peut-on parler d’une « expertise profane » ? En étant partie-prenantes des questions scientifiques (stakeholders), les profanes permettent-ils de soulever des questions et d’orienter la recherche vers des directions fructueuses ? Cependant, pour pouvoir se faire confiance, se reconnaître, s’entendre et débattre entre eux, il est nécessaire que les acteurs de la science partagent un vocabulaire commun, ainsi que certaines valeurs et standards à l’aune desquels ils jugent de la valeur de leurs témoignages respectifs. C’est à partir de ces standards communs que les scientifiques peuvent obtenir un consensus. Mais n’est-il pas parfois plus judicieux de maintenir le dissensus et le pluralisme scientifique ?
De plus, la répartition de la confiance ne repose pas seulement sur des critères épistémiques : le concept d’injustice épistémique permet de mettre en lumière que la crédibilité que l’on devrait accorder au témoignage d’une personne peut être sous-estimée pour des raisons non-épistémiques, par exemple du fait de préjugés sur ses caractéristiques sociales. L’absence de certaines perspectives en science conduit également à ce que certains individus ne puissent pas bénéficier de ressources scientifiques pour rendre compte de leurs expériences de vie. Or, ces injustices épistémiques ne sont pas seulement une perte pour l’agent victime de cette injustice, mais aussi pour la communauté dans son ensemble, puisque certains faits et certaines informations seront passées sous silence, au détriment de notre connaissance globale.
Parcours
2021